RDC : Les rebelles du M23 prennent le contrôle de Bukavu, une nouvelle avancée stratégique

La RDC fait face à une crise sécuritaire avec la prise de Bukavu par les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda. Après l’aéroport le 14 février, la ville est désormais sous leur contrôle, marquant une nouvelle escalade des violences dans l’est du pays.

RDC : Les rebelles du M23 prennent le contrôle de Bukavu, une nouvelle avancée stratégique

La République démocratique du Congo (RDC) traverse une période de crise sécuritaire marquée par une nouvelle prise de pouvoir importante par les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda. Après avoir conquis l’aéroport de Bukavu le vendredi 14 février, les rebelles ont réussi, dimanche 16 février, à contrôler entièrement la ville, un revers majeur pour le gouvernement du président Félix Tshisekedi.

Bukavu, chef-lieu de la province du Sud-Kivu et deuxième ville la plus peuplée de l’est de la RDC, est désormais sous domination des forces rebelles. Cette offensive représente une étape cruciale dans l'escalade des violences qui secouent la région depuis plusieurs années. Un million de personnes vivent dans la ville, et bien que de nombreux habitants aient fui vers le Burundi voisin, des scènes de soutien populaire aux rebelles ont été rapportées, les habitants saluant leur avancée.

Cette prise de la ville par le M23, qui fait suite à celle de Goma il y a quelques semaines, marque une nouvelle phase dans l'extension de leur territoire. Le groupe rebelle, actif depuis la fin 2021, semble renforcer son emprise sur cette région riche en ressources naturelles, notamment le coltan, un minerai crucial dans la fabrication de produits technologiques.

Un chaos temporaire, mais un sentiment de calme sur place

La chute de Bukavu a entraîné une période d'instabilité, avec des scènes de chaos et de pillages après le départ des troupes congolaises. Des milliers de personnes ont fui, mais le calme est progressivement revenu. Les rebelles, désormais maîtres de la ville, ont cherché à rassurer la population locale, assurant qu’ils prenaient la responsabilité de la sécurité et du maintien de l’ordre. Le M23 a également affirmé son rôle en tant qu’acteur politique légitime pour gérer la région, malgré l’abandon de l’armée congolaise.

Le gouvernement congolais, quant à lui, a dénoncé cette prise de pouvoir, affirmant que des efforts seraient mis en place pour restaurer l’ordre et la sécurité. Kinshasa a également pointé du doigt Kigali, accusant le Rwanda de mener une politique d'occupation et de piller les ressources du pays, tout en violant les accords internationaux.

La communauté internationale face à une situation alarmante

L’occupation de Bukavu par les rebelles a suscité une réaction vigoureuse de la communauté internationale. Le Royaume-Uni a vivement condamné cette avancée, soulignant que cela représente non seulement une violation de la souveraineté de la RDC, mais aussi une menace pour la stabilité régionale. De même, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a averti lors du sommet de l’Union africaine (UA) en Éthiopie que ce conflit pourrait entraîner une conflagration régionale, appelant à une désescalade immédiate et au respect de l'intégrité territoriale de la RDC.

Cependant, la réponse de l’Union africaine reste en deçà des attentes. Son appel à un retrait immédiat du M23 ne mentionne même pas directement le rôle présumé du Rwanda dans le conflit, ce qui illustre les divergences internes au sein de la communauté internationale sur la gestion de cette crise.

Une inquiétude grandissante : vers une balkanisation de la RDC ?

Les analystes s’inquiètent d’une éventuelle balkanisation de la RDC, une situation où le pays pourrait se fragmenter sous les coups de boutoir des multiples groupes armés et des forces extérieures. L'UA, bien que préoccupée, n’a pas encore trouvé une solution consensuelle pour résoudre ce conflit de manière durable.

La situation à Bukavu met également en lumière les vulnérabilités de l’armée congolaise, qui, malgré l’aide des Casques bleus des Nations unies, semble incapable de contenir l’avancée des rebelles. Le contrôle par le M23 des principaux aéroports et centres commerciaux de l’est de la RDC, région clé pour les minerais rares, leur donne un pouvoir stratégique croissant.

Une possible nouvelle offensive vers Kinshasa ?

Le M23, déterminé à poursuivre son expansion, envisage désormais de marcher sur Kinshasa, la capitale de la RDC, située à des centaines de kilomètres à l’ouest. Ce mouvement pourrait marquer une nouvelle étape dans la conquête de vastes zones riches en ressources, tandis que le gouvernement congolais semble toujours divisé sur la manière de gérer la situation sur le terrain.

Les rebelles du M23, tout en continuant à présenter leur contrôle sur le territoire comme une réponse à l’inefficacité du gouvernement central, renforcent leur position comme une alternative à l’autorité de l’État congolais. La RDC, déjà fragilisée par des décennies de conflits internes, se trouve aujourd’hui à un tournant décisif.